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Jenni Chacko, les pieds en Australie et le cœur en Inde

© Alliance Presse
Son mari poursuit un projet un peu fou, celui d’ouvrir 100 000 Eglises en Asie d'ici 2030. Jenni Chacko, son épouse, est australienne et mère de quatre enfants. Rencontre avec une femme aux idées claires

Depuis 1998, Empart, la mission lancée par votre mari, a déjà permis l’implantation de plus de 2500 Eglises, principalement en Inde. Comment est né votre intérêt pour l’Inde ?

Mes parents étaient missionnaires. J’ai quitté l’Australie à l’âge de quatre ans. Nous sommes allés en Papouasie-Nouvelle-Guinée, en Indonésie et en Malaisie. Je suis rentrée en Australie à
18 ans. Grâce à une formation biblique que j’ai suivie, j’ai eu l’occasion d’effectuer un stage en Inde. Après celui-ci, il est devenu clair que mon avenir serait lié à ce pays. Lors de ces mêmes études, j’ai rencontré Jossy, mon futur mari. Il était passionné par Dieu, mais pas par la mission.
Au cours de notre voyage de noces, en 1995, nous avons été tous deux convaincus que Dieu nous appelait à implanter des Eglises en Inde. Ma plus grosse difficulté a été d’admettre que nous serions plus utiles en Australie, à organiser le soutien missionnaire, que sur le terrain. J’aurais préféré vivre en Inde.

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Vous vous investissez dans la formation des femmes indiennes. Quelle est votre plus grande source de satisfaction ?
Les femmes en Inde ont une vie difficile. Beaucoup ont avorté, sont victimes d’infanticides et négligées. Elles sont souvent les dernières à manger et les moins scolarisées. Cette discrimination est présente en filigrane dans la culture indienne, même parmi les chrétiens.
Ma passion est d’accompagner les femmes pour qu’elles prennent conscience de leur valeur. Par des séminaires lancés par Empart en 2003, nous motivons des femmes occidentales à venir en Inde pour parler aux femmes indiennes. Beaucoup veulent ensuite transmettre à leur tour ce qu’elles ont reçu. Quelque 1500 femmes suivent ce séminaire chaque année.

Les femmes jouent-elles un rôle dans l’élan d’implantation d’Eglises d’Empart ?
Nous avons ouvert cinq centres de formation destinés aux femmes. En Inde, il n’est pas admis qu’une femme devienne pasteur, alors nous les formons à devenir des multiplicatrices. Certaines sont formidables. Sans les femmes, la vision d’Empart ne serait pas réaliste.
Je pense à trois jeunes femmes qui, suite à leur formation avec nous, se sont installées dans un quartier pauvre pour donner des cours aux enfants et leur apprendre à lire. La population du quartier s’est intéressée à elles et à leurs motivations. Elles ont alors organisé des rencontres pour partager leur foi. Très vite, par manque de place dans leur petite habitation, elles ont dû organiser jusqu’à huit rencontres par semaine pour accueillir les intéressés. Trois prêtres hindous ont aussi voulu en savoir plus; après plusieurs rencontres, l’un est devenu chrétien. Et les religieux ont finalement mis le temple hindou à la disposition des trois jeunes femmes pour leur permettre d’accueillir plus de monde !

Comment font ces femmes pour subvenir à leurs besoins financiers ?
Nous leur offrons des cours de couture. Elles repartent avec une machine à coudre « sous le bras », ce qui leur permet de générer du revenu grâce à leur artisanat. Les Indiennes sont travailleuses. Si vous soutenez un homme, 30% à 40% de l’aide reviendra à la famille. Si c’est une femme qui en bénéficie, 90% du revenu profite à la famille.

Les massacres de chrétiens en Orissa en 2008 ont fait prendre conscience au monde que la persécution sévissait aussi en Inde. Les femmes que vous formez y sont-elles aussi confrontées ?
Les femmes qui abandonnent l’hindouisme pour le christianisme sont les principales victimes de discrimination. Certaines sont chassées de chez elles, d’autres exécutées. Et il arrive que des proches promettent de fortes sommes d’argent à celles qui reviendraient à l’hindouisme.
Nous avons vu des situations dramatiques. Une femme qui, au Népal, s’est tournée vers le christianisme, a été jetée dans une rivière, après avoir été battue par son mari et considérée comme morte. Des chrétiens ont vu son corps dériver, l’ont recueillie et soignée. Aujourd’hui, après une formation, elle vient en aide aux femmes victimes de violence.

Quelle est la plus grande leçon que vous avez apprise au contact de ces femmes ?
J’ai la chance de connaître ma valeur en tant que femme. Lorsque je vois le peu de reconnaissance mais aussi de ressources dont bénéficient ces femmes, je vois ma responsabilité : « A celui qui a beaucoup reçu, il sera beaucoup demandé » (Lc 12,47).

Quelles valeurs aimeriez-vous transmettre à vos enfants ?
Je suis heureuse d’offrir à mes enfants une famille multiculturelle où ils apprennent à connaître et apprécier les différences. J’aimerais qu’ils retiennent que, même si nous sommes différents, nous avons tous la même valeur. Je serais bien sûr encore plus enchantée qu’ils se tournent un jour vers Dieu.

Comment voyez-vous votre rôle en tant que mère de famille ?
Une mère essaie de donner le meilleur à ses enfants. Mais si nos enfants et leur réussite sont notre seule raison de vivre, nous devenons égoïstes et nous en ferons des enfants égoïstes.
La famille n’est pas le centre du monde. Je dois leur apprendre à s’intéresser aux autres, aux moins favorisés, pour leur inculquer une vision du monde qui les rendra plus ouverts et généreux.

Chrisitan Willi

SpirituElles

Article tiré du numéro SpirituElles 4-11 Décembre – Février


Deux questions plus personnelles

A quelle scène biblique auriez-vous voulu assister ?
A celle de Marthe et Marie, quand l’une s’active et que l’autre écoute Jésus. J’aurais plusieurs questions à poser à Jésus à ce sujet…

Quelle est votre plus grande tentation ?
Lire un bon livre en grignotant du chocolat suisse !

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